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Le blog de la prospective

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Cet article traite des nouvelles tendances constatées ou à venir dans les métiers de l'Artisanat. © 2010

LA MUTATION NECESSAIRE DE L’ARTISANAT


Les mouvements d'humeur sporadiques des artisans de France contre le statut d'auto-entrepreneur, ces dernières semaines, sont bien plus profonds qu'une simple opposition à une initiative de l'Etat. Ils sont en fait caractéristiques de la mutation en cours d'un mode d'activité dans une foultitude de professions manuelles. La "première Entreprise de France" est également la plus ancienne entreprise, avec l'agriculture. Elle vit de ce fait au diapason de la Société qu'elle accompagne dans ses circonvolutions. Or force est de constater que la profonde transformation sociétale actuelle est difficilement vécue par de nombreux artisans.


Pour devenir la "Première Entreprise de France", l'Artisanat a choisi de se fédérer au fil des ans, pour protéger ses acquis économiques avant tout. En créant des labels, en instaurant des contrôles, en accréditant ses membres, l'Artisanat a ainsi voulu protéger les anciens contre les nouveaux. Parce que le gâteau n'est pas extensible à souhait. Alors exit les étrangers, ces immigrés habiles manuels qui ne sont pas à cheval sur les prix et les horaires de travail. Exit aussi ces doubles actifs, venus d'un autre monde s'adonner aux joies de l'Artisanat. Exit encore les bricoleurs qui choisissent une activité manuelle indépendante pour ne pas crever de faim. Pourtant, le lobby n'a pas joué quand l'Etat a créé le statut d'auto-entrepreneur. Les élus artisans devaient être trop occupés par leurs ripailles et leurs conflits électifs pour ne pas avoir vu venir l'oukaze. Les membres de la "Première Entreprise", quant à eux, vivaient installés dans leur confort économique, d'avant l'automne 2008, entre carnet de commandes bondé et clients agacés par les retards. Mais voilà le krach financier est passé par là et avec lui une désaffection de la clientèle. Et pendant ce temps, les auto-entrepreneurs fleurissent à chaque coin de rue, avec des avantages sociaux indéniables. Une jolie réussite de la collectivité qui répond à une attente de la population et qui permet pour part de juguler le travail noir. Les artisans, aiguisés par leurs élus professionnels enfin sortis de leur déjeuner, ont alors désigné les fautifs de leurs difficultés. Facile !


La réalité réelle est bien plus pénible à accepter : c'est la Société qui vient subitement de changer de palier. La crise économique a d'abord affecté l'épargne. Par précaution, le Français dépense moins, voire mieux pour le peu qu'il dépense. Alors l'auto-artisanat marche à fond la caisse. La rénovation a du plomb dans l'aile. Même la belle invention du développement durable écarquille les yeux. Et ne nous leurrons pas : la reprise bientôt acquise ne ramènera pas les beaux jours. Car le Français a rejoint l'Italien : la combinazione marche à plein pour en avoir le plus possible pour son argent. C'est un constat dans tous les compartiments du jeu de la consommation : les règles et les us n'existent plus.


Alors que faire ? L'Artisan, au fait de la chose, est en train de se structurer. Tout d'abord, il s'engouffre dans la multi-compétence. Pourquoi, en effet, se consacrer à un seul métier quand la palette peut être étendue à souhait ? Forcément la "Première Entreprise" va en avoir mal au ventre : l'auto-concurrence va jouer à fond. Pour les réfractaires au polyartisanat, l'issue est l'association de compétences. Cela existe déjà mais l'on va voir apparaître des enseignes commerciales formalisant des réseaux, non plus catégoriels, mais trans-professions. L'organisation de filières va en prendre un coup. Les gros artisans vont être les premières victimes. Pour vendre une marque, les artisans regroupés vont faire du marketing, encore plus de marketing. L'action commerciale sera désormais ciblée. Sale coup pour les plate-formes téléphoniques d'Afrique du Nord qui auront moins l'occasion de souhaiter bon appétit aux Français à l'heure du déjeuner ! Enfin ces associations sauront mutualiser les moyens de leurs membres.


Un super boulot pour les agences de communication et les fournituristes !

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